Topographie de Taza et de ses abords.

   Négligeons la rive de l'Innaouen. Ses collines constituent un obstacle incontestable, mais elles sont trop confondues pour que l'on puisse y trouver un emplacement convenable à l'établissement d'une forteresse..

   Par ailleurs, on n'y rencontre aucune étendue plane favorable au développement d'une ville. Vers le Sud, parmi les quatre buttes que nous avons citées, le Koudia Mimouna, aux pentes trop faibles, manque de défense rapprochée. D'ailleurs, il est dépourvu de plateforme susceptible de servir de refuge sérieux à une population assiégée. Draa El Louz a des pentes encore plus faibles et surtout il est dominé immédiatement par Taza-Haut. Néanmoins il semble tout indiqué pour l'extension d'une ville dont la citadelle serait située à Taza-Haut.

   Reste le Kern Nesrani et. Taza-Haut, deux plateformes de travertins dont les bords forment falaise et qui sont de vraies forteresses naturelles. Le Kern Nesrani commande absolument le bassin qui va jusqu'au Touahar, mais la falaise qui borde la plateforme est moins importante qu'à Taza-Haut et les longues pentes régulières qui le précèdent sont bien moins favorables à la défense. Enfin, l'incommodité des pentes pour l'établissement de faubourgs et surtout la difficulté d'adduction d'eau sont à retenir.

   Taza-Haut au contraire, avec ses escarpements impressionnants à l'ouest, au-dessus de l'Oued Taza, ses abrupts très pénibles au Nord et à l'Est, commande le défilé vers lequel la butte de Draa El Louz lui donne un point d'appui avancé. La plateforme fertile qui s'étale au pied de l'éperon vers le Nord et vers l'Est est tout à fait favorable aux possibilités d'extension. De plus vers l'Est, les sources abondantes d'Ain Anemli et Ain Nessa indiquent tout naturellement l'emplacement de faubourg, sous la protection immédiate de la citadelle. Enfin, vers le Nord l'éperon se relie aux contreforts du Djebel Ghiata par une langue de terre facile à surveiller. Elle permet en outre une adduction très aisée des eaux des sources supérieures qui se trouvent à proximité, dont celles de la résurgence de Ras El Maa, qui forme l'Oued Taza. Taza correspondrait donc aux conditions optimales.

Ethnographie

   Un dernier point important nous reste à examiner d'entrer dans l'étude historique par elle-même.

   la Quelle population trouvons nous à Taza et aux environs ? Taza par elle- même n'a évidemment pas une population absolument définie mais elle comporte néanmoins d'importants éléments hadri, se différenciant très nettement des notables du bled environnant. On sent l'empreinte maghzen et trace d'émigrants fassis ou tlemcénis. En ce qui concerne les tribus Taza se trouve en bordure Nord de la grande confédération Ghiata. C'est là un ensemble peu homogène, mal caractérisé, d'origine berbère incontestable, mais fortement arabisé à part la fraction des Ahel Doula, aucune autre ne parle de dialecte berbère. Les traditions relatives à cette tribu confirment son manque d'homogénéité. Vers le Sud elle est bordée par l'immense confédération Béni- Ouaraine, elle bien plus nettement individualisée, restée beaucoup plus berbère, tant au point de vue coutume, qu'au point de vue langage. Les tribus qui s'y attachent étant en général bilingues. Il ne semble pas malgré tout que leur origine soit unique leur dialecte a des caractères mixtes, il tient surtout du groupe tamazirt, mais s'apparente aussi au groupe zénète. Néanmoins ils ont formé un tout assez homogène, leurs éléments s'étaient bien amalgamés, à l'abri des hautes montagnes où ils vivent.

   Vers l'Est le débouché du Seuil se trouve occupé par les Haouara : cette tribu a une origine berbère et ses ancêtres sont venus de régions très éloignées situées à la frontière tuniso-algérienne. Mais elle est tellement arabisée que ses voisins dénomment ses ressortissants les "Arab", d'ailleurs. elle a englobé des éléments arabes très importants, on peut citer à ce sujet le cas récent de l'une de ses tribus les, Ouled-Raho qui faisaient partie, il y a un siècle du groupement arabe des Ahlaf Dans la vallée de l'Oued Larbaa et la vallée de l'Oued el Haddar, nous trouvons aux abords immédiats de Taza la petite tribu des Meknassa, lambeau d'une puissante tribu berbère qui a perdu tous ses caractères et jusqu'au souvenir d'elle-même. Elle est complètement arabisée. Vers le Nord-Est, entre les sources de l'Oued Larbaa et le bassin du M'Soun nous trouvons trois minuscules tribus:

1°) les Ouled Bekkar, arabes abatardis par leurs voisins d'origine berbère.

2) les Meghraoua, lambeau d'une puissante tribu berbère origine du Moghreb central et quelque peu arabisée..

3) les Ouled Bou Rima, petite tribu qui se rattachera aux Branés. Avec le bassin du Haut M'Soun on arrive aux grandes tribus rifaines des Gzennaya, Métalsa et Béni Bou Yahi, qui surveillent le débouché Est du Seuil. Vers le Nord-Ouest, entre l'Innaouen et l'Oued El Haddar, nous trouvons le bloc des Tsoul qui occupe un massif de collines assez bien délimité. Ils gardent une individualité propre, bien que leurs caractéristiques soient complètement voilées par une arabisation avancée.

   Le haut Oued El haddar et le massif qui le sépare de l'Oued Larbaa et du haut M'Soun, sont occupés par les tribus Branés. Il s'agit encore là de populations berbères arabisées. Elles le sont moins cependant que les Tsoul étant en contact immédiat vers le seuil. Comme chez les Ghiata, il ne reste que de rares éléments parlant encore un dialecte berbère.

   Vers le Nord-Ouest, en passant dans le bassin du Leben et de l'Ouergha, trouvons diverses tribus où il n'y a rien à signaler en dehors de nous groupements rifains (Marnissa, etc.). Les Senhadja de Gheddo qui font partie d'un ensemble de Senhadjas venus s'installer aux portes du pays rifain. Enfin, la partie Ouest du Seuil est bordée par la confédération des Hayaina, ensemble qui lui aussi est d'origine berbère, mais est complètement arabisé. En résumé nous voyons les abords de Taza peuplés d'une façon variée et complexe. Nous y trouvons dans l'axe du seuil :

1) Des arabes abâtardis (Ouled Bekkar) ou amalgamés aux débris de populations berbères arabisées (Haouara).

2) Les débris d'anciennes tribus berbères puissantes devenues méconnaissables, complètement arabisées (Meknassa) ou du moins très évoluées (Maghraoua).

3) Des tribus d'origine mixte, dont les éléments hétérogènes canalisés dans le Seuil de Taza et cimentés par une arabisation très poussée, se sont fondus dans les confédérations assez bien individualisées (Ghiata, Tsoul, Hayaina).

4) Des tribus berbères plus homogènes à l'origine, mais non moins arabisées (Branés). Plus on s'écarte de l'axe plus on trouve des tribus homogènes ayant gardé leurs caractères berbères originels. Vers le Nord nous trouvons ainsi, d'une part les tribus rifaines des Déni Bou Yahia, Métalsa, Gznaia, Marnissa, d'autre part les Sendhadjas de Gheddo et Mosbah. Vers le Sud nous trouvons la grande masse des Béni-Ouarain née d'un amalgame berbère où sont fondus Botr et Senhadjiens.

   Cet examen sommaire nous prouve la complexité des origines populations du Seuil et nous indique qu'elles y ont subi le brassage énergique d'une histoire agitée et fertile en migrations humaines.


Données préhistoriques

   Si, comme nous l'avons vu, Taza était prédestinée à devenir un lieu d'habitat elle réunissait des conditions tout particulièrement propices à l'établissement de l'homme Primitif.

   D'une part, l'ensemble du seuil de Taza est recouvert de dépôts très récents et il est incontestable que l'homme primitif recherchait souvent les rives lacustres, il trouvait des possibilités toutes particulières pour la chasse et la pêche. D'ailleurs les découvertes archéologiques du Maroc sont bien caractéristiques à ce sujet.

   L'épaisseur énorme de travertins quaternaires dont les plateformes imposantes du Kern Nesrani, et de Taza-haut sont des témoins. L'abondance des alluvions récentes prouvent assez que le Seuil n'a été évacué par les eaux qu'à une époque relativement récente. En outre, les buttes de travertins que les torrents découpaient aisément   en tables et où les grottes naturelles se créaient fréquemment, fournissaient    des abris faciles. Dès que l'homme e eu tant soit peu la notion de travailler à améliorer ces refuges, il a trouvé dans ces terrains des poches friables, facilement utilisables. Par ailleurs, les traditions de troglodytisme d'une   grande partie des berbères sont certaines, la toponymie et les dénominations  de tribus en donnent de nombreux exemples (Urane, Ait Ifri, Béni Ifrene).    Encore de nos jours, les cavernes de Taza sont tristement connues pour être le repaire d'une population misérable et les canyons de l'Oued inaouen de 1'Oued Zireg sont peuplés de cavernes qui sont encore habitées en hiver ou qui du moins l'ont été récemment. Ces derniers n'ont fait jusqu'ici l'objet d'aucune étude sérieuse, mais toute la partie orientale du Seuil de Taza a fourni une ample documentation.

   Les stations de Guercif, Safsafat, Taza et Bab Merzouka constituent un ensemble très important qui embrasse tout le paléolithique marocain. Le coup de poing Chelléen a été rencontré à Safsafat. Les outils peu différenciés de l'Acheuléen ont été trouvés à Bab Merzouka, Safsafat et Guercif les éclats de forme ovale du Levalloisien à Safsafat. Le moustérien est représenté dans le Libéro-Maurusien enfin se rencontre Guercif et Kifan el Ghomari où les fouilles ont été particulièrement fructueuses.

   Quant au néolothique confus et discuté du Maroc, il a laissé des traces à Safsafat et à Taza et une moisson abondante de haches polies a été faite à Bab Merzouka. Laissons de côté la station de Guercif qui relève bien plutôt de la plaine de la Moulouya et examinons les trois autres gisements qui sont, d'ailleurs plus particulièrement intéressants. Le gisement de Safsafat étudié par Bourilly fournit une documentation fort variée.

   Les falaises quaternaires qui bordent l'Oued Melloulou n'ont certes gardé aucun vestige patent d'habitation troglodyte mais cela est compensé par l'abondance des outils trouvés, outils d'époques variées qui se répartissent sur une vaste étendue et ne constituent pas moins de dix stations. Le paléolithique le plus ancien y est représenté en abondance par les massifs coups-de-poing chelléens à la taille fruste, les coups-de-poing moins épais et les racloirs discoides de l'Acheuléen. Le paléolithique moyen fournit quelques vastes éclats unifaces plus ou moins retaillés en lames du Levalloisien, ainsi que des points à mains de taille moustérienne et des outils de formes variées qui semblent appartenir à l'atérien car les retouches qu'ils comportent viennent compléter une taille à grands éclats. Le paléolothique supérieur est bien représenté selon son faciès marocain  ibéro-maurusien par des lames et lamelles coupantes à dos rabattus ou non, de petites pointes à main, des éclats variés retouchés ou non. On passe insensiblement au néolithique ancien par des objets perfectionnés (crocs, hameçons par exemple). On rencontre enfin le paléolithioue berbère avec des objets extrêmement variés mais qui pourtant marquent une régression très nette dans l'habileté du technicien. Certes on trouve des traces d'usure et de polissage, mais nous trouvons dans ces objets la marque de le négligence atavique du berbère Botr  ou Zénète qui n'hésite pas à utiliser n'importe quelle pierre, sans trop se  préoccuper de sa nature, ni de sa forme.

   Par ailleurs, l'abondance et la variété des points de flèches est à signaler. On peut se demander si cette industrie si différente de l'industrie précédente et si inférieure à certains égards ne correspond pas à l'arrivée d'une nouvelle race. Celle-ci arrivant dans ce seuil de Taza vouée aux invasions y aurait submergé une race plus soigneuse, plus portée vers la pêche. La nouvelle peuplade routinière et négligente n'aurait tenu aucun compte de la technique.

   Safsafat fournit enfin des vestiges de très anciennes murailles, L'on peut donc considérer que cette station trace la chronologie complète de la préhistoire depuis les époques les plus reculées. La station de Bab Merzouka de son côté a fourni les nombreuses "haches" de Xavier de Cardaillac, qui laisse supposer qu'elle constituait une véritable "usine" et d'un important arsenal Cette station est localisée sur un promontoire d'où l'homme pouvait aisément surveiller les alentours et sur lequel il se trouvait à proximité de 1'Oued et de diverses sources. L'endroit constituait un refuge tout indiqué pour les premiers habitants du pays. Monsieur de Cardaillac considère les haches découvertes comme les vestiges de périodes successives du néolithique. Mais Monsieur RUHLMAN les échelonne sur une période beaucoup plus étendue. Certaines sont en réalité des coups-de-poing Acheuléens. Il est à signaler à ce sujet que ces outils étaient taillés dans les roches dioritiques qui proviennent incontestablement du Tazekka, dont le dome imposant est distant d'une dizaine de kilomètres preuve manifeste du soin apporté à son travail par la population primitive du seuil de Taza, soin qui contraste nettement avec la négligence signalée à Safsafat pour la période néolithique récente.

   Il est certain qu'à Bab Merzouka on a décelé surtout des types se rattachant aux diverses époques du néolithique d'abord de nombreux objets en forme de tranchet, de couperet et de pic, qui sont à rattacher au campignien, et qui, bien que non polis, sont particulièrement soignés et comportent un excellent tranchant.

   Quelques haches aux faces taillées et au tranchant poli enfin des objets entièrement polis, en particulier les célèbres haches à boudin et de véritables broyeurs à grain qui sont le signe d'une civilisation déjà plus avancée.

   Les trouvailles semblent marquer un progrès continu dans l'industrie préhistorique locale et ne correspondent nullement à la brutale solution de continuité de Safsafat.

   L'étude comparée des deux gisements permet donc de se demander si la première race industrielle du Seuil, sans doute Senhadjienne, n'a pas été refoulée du débouché Oriental par une race plus grossière. Cette dernière se signalait par l'emploi de la flèche, tandis que la première aurait particulièrement employé la fronde comme semble l'indiquer les galets arrondis sommairement ouvrés, qu'ont fournis Bab Merzouka et le Paléolithique de Safsafat.

   Cette étude des gisements de Safsafat et de Bab Merzouka peut paraître un peu détaillée dans le cadre d'une histoire de Taza. Mais l'hypothèse qu'elle nous e permis de formuler semble confirmer la nécessité absolue de n'étudier Taza qu'en fonction de ses abords.

   Bien entendu nous allons examiner à présent la grotte de Kifan el Ghomari, mais l'étude faite ci-dessus nous permet de supposer l'arrêt d'une invasion préhistorique en un lieu situé entre Safsafat et Bab Merzouka et de plus elle aidera à combler les lacunes obligatoires de l'étude préhistorique de Taza. Certes Kifan el Ghomari est un document de premier ordre, mais il ne peut être que fragmentaire. En un centre comme Taza où la main de l'homme e laissé des traces si considérables et si multipliées d'une activité sans fin, comment espérer retrouver d'abondants documents sur les premiers âges de son histoires.

   Le seul gisement important, qui e été signalé par le capitaine Petit et exploré ensuite en détail par le lieutenant CAMPARDOU, nous fournit ensuite des vestiges d'une haute valeur scientifique. La grotte de Kifan el Ghomari a permis en effet de retrouver des traces patentes d'habitats effectifs, à deux époques différentes du paléolithique.

   Cette grotte contient des dépôts épais où des fouilles méthodiques ont permis de déterminer quatre couches bien distinctes.

1) Une couche superficielle avec débris de poteries récentes.

2) Une intermédiaire contenant des sépultures, qui feront l'objet d'une étude ultérieure.

3)-une couche archéologique renforçant un nombre considérable d'objets d'âge ibéro-Maurusien et les tracas de cinq foyers.

4) une couche de remplissage où de multiples silex attribués moustérien ancien ont complété la découverte d'un sixième foyer.

   Cette couche profonde a fourni grâce à la découverte de ce foyer le premier vestige connu au Maroc d'un habitat moustérien. On y trouve en effet une importante lentille de cendre et le dépôt était semé d'une dizaine de silex taillés, racloirs et lames que leur facture générale (objet de taille médiocre, face dorsale lisse, retouches assez soignées) a fait de dater du moustérien mais l'absence de retouches marginales semble indiquer une époque particulièrement ancienne dans cet étage.

   Les dépôts les plus récents de cette même couche ont fourni une moisson considérable de pointes à main, de grattoirs, de racloirs et de lames, mais ceux-là à retouches marginales représentant assurément le moustérien classique; cet étage est d'autant mieux daté que de nombreux ossements ont permis de préciser la faune contemporaine. Il est à signaler que cette couche est une couche sableuse de remplissage; cela prouve que cette grotte, pendent toute la période moustérienne, n'a pu offrir que des conditions d'habitats instables qui rendent particulièrement intéressantes la découverte du foyer et 1'abondance des silex taillés.

   La couche supérieure au contraire, est une couche archéologique dont la nature indique qu'au moment de sa formation l'eau ne disputait plus la grotte à l'homme.

   On y trouve une documentation considérable. Tout d'abord cinq foyers ont laissé leurs vestiges. Tous les cinq se trouvent à proximité de la grotte et étaient constitués par de grosses pierres disposées sans ordre contre la paroi. Une couche cendreuse importante les entourait, les cendres associées à des silex taillés et des os avaient constitué une véritable broche de composition originale. L'homme primitif s'associait inconsciemment à la nature dans la tâche créatrice.

   Des ossements d'animaux les coquilles d'hélix qui abondent près des foyers, peuvent être considérés comme des résidus de nourriture. Mais le document essentiel est constitué par la quantité invraisemblable de pierres taillées et d'éclats résiduels, qui constellaient l'ensemble de la couche. On y a trouvé également un certain nombre d'objets en os taillé et poli. Le lieutenant CAMPARDOU prétend avoir trouvé près de 4.000 pièces dont mille incontestables, dans un espace total de 40 mètres carrés, cela représente vraiment un gisement d'une richesse remarquable.

   Ces silex taillés comprennent surtout des lames retouchées finement, dont d'ailleurs des plus diverses. Il y a également un grand nombre de muscléi. Les objets en os comprennent quelques forts poinçons et un certain nombre d'aiguilles sans chas.

   Tout cet ensemble pu être facilement daté comme appartenant à 1'ibéro-maurusien, le perfectionnement de certaines pièces et un certain nombre de lames à encoches, marquent le passage au néolithique ancien. Les ossements humains rencontrés sont peu importants, rien d'étonnant à cela dans une grotte habitée avec persistance, grotte qui de plus était de dimensions restreintes. Les ossements animaux trouvés en ce point ont permis de situer géologiquement l'ibéro-maurusien, il représentait le faciès humain de la toute dernière phase du pléistocène.

   Sans vouloir insister sur l'intérêt géologique et archéologique du gisement susceptible d'apporter de tels éléments de connaissance, les faits qui le motivent prouvent assez qu'il ne s'agit pas d'un habitat secondaire, mais d'un habitat important de fixité millénaire. Le dépôt sédimentaire qui recouvre cette couche  ibéro-maurusienne, conservée grâce à lui, marque un retour offensif de l'eau qui nous vaut de ne pas trouver de documentation néolithique. Comme malheureusement on n'a pas trouvé d'autres gisements en place et que l'on ne peut guère compter sur ce sol indéfiniment bouleversé par les générations successives, on doit se contenir de dire qu'à l'aube du néolithique Taza prouve par son industrie ibéro- maurusienne qu'elle était habitée par une population similaire aussi bien à celle d'El Hank à Casablanca, qu'à celle de Guercif sur la Moulouya de la mouillah à la frontière algérienne et même d'Ouchata en Tunisie.

   Au contraire les recherches faites au sujet de la nécropole de Taza ont permis de retrouver des  haches à boudin dans les couches de terres profondes, le lieutenant CAMPARDOU les attribue à l'époque du creusement, des sépulcres de cette nécropole, ce n'est qu' une hypothèse, mais ce qui nous intéresse bien plus que la date archéologique précise, c'est le fait que ces haches sont en tout point semblables à celles de Bab Merzouka, qu'elles marquent 1'habitation d'une population commune tandis que Safsafat pourvu d'une série si complète de documents, n'en possède pas. Dans les mêmes terres où ont été trouvées les deux haches de la nécropole, quelques silex grossiers de la série dite berbère font songer aux éléments trouvés à Safsafat. Mais ces silex sont-ils assez caractéristiques pour être identifiés avec certitude?

   Tout ce qu'on peut dire, c'est que ce genre est à peu près absent à Bab Merzouka qu'il semble que Taza en soit pourvu, mais c'est à Safsafat qu'il abonde, ce qui donne une répartition inverse de celle de la hache à boudin.

   Ces faits sembleraient confirmer l'hypothèse déjà signalée d'une poussée qui aurait chassé de Safsafat sa population initiale, mais qui aurait trouvé une barrière avant Bab Merzouka. Il serait infiniment osé de fixer cette barrière à Taza, tout ce que l'on peut dire c'est que la race primitive du Seuil avait encore des représentants à Taza à une époque où les envahisseurs 1'avaient complètement refoulé de Safsafat. Ces envahisseurs avoir atteint Bab Merzouka. Pour Taza i l ne y paraissaient a doute. pas En résumé l'étude de la période préhistorique semble autoriser les conclusions suivantes :

1) La partie Orientale du Seuil de Taza aurait été occupée d'une façon constante et importante aussi bien néolithique. au paléolithique qu'au

2) La fin du Paléolithique et le passage au néolithique aurait vu civilisation commune et uniforme de Tunis à Casablanca, sur la une bordure nord de l'Afrique mineure et cela en particulier dans la contrée qui nous occupe.

3) Au néolithique une invasion par la plaine de la Moulouya aurait rejeté les autochtones de l'entrée du Seuil et les aurait obligés à se retirer vers la partie centrale où la nature leur offrait des éléments de défense efficaces.

C'est ainsi que les autochtones auraient pu continuer à améliorer leur technique déjà soignée, dans la région de Bab Merzouka, tandis que les envahisseurs frustes se contentaient du travail très primitif de safsafat.

4) faisant toute réserve, on peut formuler l’hypothèse que l’invasion a trouvé au moins provisoirement à Taza la limite de son extension.